Dans cette entretien, Christian Urbanescu, membre de la communauté Elektor, nous fait part de son parcours de passionné d'électronique à éducateur, nous donnant un aperçu de sa passion pour la technologie et l'apprentissage pratique. Il nous parle de son travail dans le domaine de l'automatisation, de ses unités didactiques PLC artisanales et de la façon dont sa présence sur les médias sociaux contribue à inspirer d'autres membres de la communauté des makers. Disposant d'un espace de travail dans la banlieue de Montréal au Québec, il continue de tisser des liens avec les autres par l'intermédiaire de sa chaîne YouTube et de ses plateformes sociales, créant ainsi un espace où l'apprentissage et l'innovation se développent.

ElektorPouvez-vous nous parler un peu de votre parcours et de votre cheminement dans votre spécialité ?

Christian Urbanescu : Avec le recul, toute ma carrière professionnelle n'a été qu'une longue suite de rebondissements et de contradictions. Je vais en omettre une bonne partie car je ne veux pas que le sourire sur vos visages devienne trop exagéré. Commençons par le service militaire qui, à mon époque, était obligatoire. J'ai été engagé dans la marine et, peu après, ma demande ambitieuse d'une place dans l'orchestre de la marine a été rejetée « bonne oreille mais pas de talent pour le violon, mon garçon »... Quelqu'un de plus-haut placé a remarqué ma formation en électronique et j'ai donc été recruté pour un an par le centre de recherche de la marine. C'est là que j'ai vu pour la première fois du matériel d'enregistrement Bang & Olufsen. Pour moi cela ressemblait à de la technologie martienne.

Après avoir terminé mon service militaire, j'ai travaillé pendant trois ans dans une usine de téléviseurs, effectuant tous les travaux d'usine imaginables, allant du transport des palettes contenant les énormes tubes cathodiques à l'assemblage des pièces, en passant par le contrôle de la qualité. J'ai quitté l'usine avec de bonnes compétences en soudure, une bonne connaissance de toutes les pièces d'un téléviseur et de nouvelles compétences précieuses, comme la faculté à pouvoir faire la distinction entre un choc électrique venant d'un transformateur à haute tension ou d'un condensateur. Ce n'est pas la même chose. J'y serais resté plus longtemps si mes demandes récurrentes pour l'équipe de nuit n'avaient pas toujours été refusées. Mon rêve de suivre les cours du matin à l'université était en train de s'évanouir.

 
Christian Urbanescu dans son espace de travail en électronique.

Par un autre hasard, quelqu'un qui avait quitté l'usine quelques mois plus tôt m'a recommandé pour un poste de technicien dans un laboratoire lié à l'industrie de l'imprimerie. J'ai accepté sans hésiter. Je suis devenu technicien posté en journée et j'ai eu la chance d'étudier dans le programme de systèmes automatisés, avec la première promotion qui proposait des cours du soir, à partir de 1980. Parmi les nombreuses choses que j'ai apprises au laboratoire on peut citer le travail avec des thyristors, la construction de minuteries programmables et l'utilisation d'un logiciel de conception de circuits imprimés sous DOS ! J'aimerais trouver aujourd'hui un logiciel aussi simple et efficace. Pouvez-vous imaginer qu'il puisse être contenu sur une disquette ?

Six ans plus tard, je suis devenu ingénieur. Six années qui se sont écoulées en un clin d'œil. Je me suis spécialisé dans deux domaines : l'informatique et l'automatisation industrielle. Puis j'ai trouvé une place dans un centre informatique/de données, et par chance, je suis tombé entre les mains de deux ingénieurs plus âgés qui m'ont appris presque tout ce que je sais aujourd'hui sur les techniques informatiques. Grâce à eux, j'ai été envoyé travailler sur les nouveaux mini-ordinateurs DEC PDP et j'ai appris les rudiments d'un système d'exploitation de type UNIX. Ils m'ont également envoyé en formation pour réparer diverses cartes d'ordinateur et de périphériques.

Aussi drôle que cela puisse paraître aujourd'hui, je comprenais aussi la signification de certaines instructions en BASIC comme « print » . Dans le célèbre sous-sol du centre de calcul, dirigé par un système autrichien de contrôle du climat, les opérateurs des ordinateurs centraux et des mini-ordinateurs utilisaient des « terminaux ». Contrairement aux micro-ordinateurs d'aujourd'hui, à l'époque un terminal d'opérateur ressemblait davantage à une machine à écrire automatisée. Il comportait un clavier et une imprimante bidirectionnelle, interfacée pour communiquer avec l'ordinateur central et alimentée en continuellement en papier. Trois objectifs étaient visés : l'opérateur pouvait envoyer des commandes à l'ordinateur, recevoir des informations en retour ou des réponses aux instructions, et exécuter également les demandes des utilisateurs du réseau. En fonction des options choisies, la commande print pouvait soit afficher l'information devant vos yeux, soit l'envoyer à l'imposante imprimante matricielle, un peu comme on envoie aujourd'hui un gros fichier PDF. Ce centre de calcul a été l'endroit le plus avantageux et le plus stimulant pour ma formation technique.

Mais comme avec toutes les bonnes choses, il y eu une fin. À la veille des années 90, la plupart des centres de calcul de taille moyenne comme le nôtre ont disparu et ont été démantelés. Avec quatre autres collègues, nous avons fondé notre première société, et notre premier projet a été de déstabiliser l'un de nos concurrents ! Nous avons découvert qu'il possédait des ordinateurs plus nombreux et de meilleure qualité que les nôtres, mais ils ont quand même fini en pièces détachées. Ce que je peux vous dire, c'est qu'il faut parfois des semaines pour construire un ordinateur central dans une installation spécialisée. Il a fallu une certaine organisation, bien sûr, mais seulement trois jours pour que les cinq d'entre nous démontent et emportent le contenu du centre. La récupération des pièces et la réorganisation du matériel ont duré tout l'été suivant. Nous nous sommes beaucoup amusés !


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Le meilleur projet a été l'organisation de la maintenance des mini-ordinateurs pour le ministère des finances et les six districts financiers de la capitale. Nous avons fait cela pendant deux bonnes années. Pour tous ces projets, j'ai toujours formé mes clients avec le plus grand soin, afin de ne pas avoir à parcourir des centaines de kilomètres pour aller les voir. Fort de ma solide expérience en matière de formation, je suis passé de l'ingénierie à l'enseignement lorsque je suis arrivé au Canada en 1998.

Et nous voici 25 ans plus tard. J'ai obtenu mon permis d'enseigner à l'Université McGill en 2007, et entre-temps, j'ai obtenu un certificat en programmation à l'Université de Montréal. Bien que j'ai programmé des automates pendant des années, je ne me suis jamais considéré comme un programmeur, mais plutôt comme quelqu'un qui s'occupe du matériel.

 
Unité de formation sur les automates compacte.

Elektor Comment avez-vous commencé votre parcours en tant que créateur de contenu sur YouTube ? Quels sont vos principaux domaines d'intérêt ou les sujets que vous abordez dans vos vidéos ?

Christian Urbanescu Pendant des années, j'ai été très réticent à utiliser des vidéos pendant mes cours. L'une des rares exceptions a été la présentation et l'analyse du virus Stuxnet, conçu pour attaquer les logiciels PLC de Siemens. Je devais admettre que les nouvelles générations d'étudiants étaient accros aux vidéos, j'ai donc pensé à ajouter quelques vidéos uniquement pour captiver leur attention, et aussi offrir une aide visuelle aux quelques étudiants qui voulaient monter leurs propres simulateurs d'automates à la maison, et qui ne pouvaient pas avoir un accès direct à mes conseils pendant les soirées tardives ou les week-ends.

À l'automne 2022, j'ai décidé de lancer la chaîne. Et, presque venu de nulle part, alors que je suis encore un jeune YouTubeur inexpérimenté, j'ai maintenant environ 130 vidéos en ligne. La chaîne comporte pour l'instant quatre sections :

  • « PLC trainers step-by-step. » Cela traite dans les détails les étapes de la fabrication d'un simulateur personnel, depuis l'observation de certains de mes projets, à la commande des pièces, jusqu'à leur montage pour obtenir un produit fini. Je n'abandonnerai jamais mon opinion, selon laquelle si vous voulez vraiment progresser dans la compréhension de la programmation PLC, une étape essentielle est d'avoir un véritable automate sous la main. Pas un simulateur logiciel, pas de vidéos YouTube, mais un véritable matériel. Vous serez surpris de découvrir le nombre de choses auxquelles vous n'avez pas pensé dans votre programme jusqu'à ce que vous le mettiez dans un automate physique, et que vous observiez le résultat de vos instructions.
  • « Your time to shine. » Une série de 11 vidéos, documentant les efforts de deux de mes étudiants qui ont travaillé jusqu'au bout pour réaliser leurs propres simulateurs, et les rendre entièrement fonctionnels. Étant aussi fier que mes étudiants avec chacun de leurs projets achevés, pourquoi ne pas donner à Diyu et Rodney la reconnaissance qu'ils méritent ?
  • « PLC Networking: The French Connection. » Comme tous les étudiants n'ont pas pu bénéficier de mon enseignement concernant le cours sur les automates programmables, j'ai voulu mettre à leur disposition une vue d'ensemble du fonctionnement d'un réseau local, comme les postes de travail dans une usine, où les stations individuelles peuvent exécuter des tâches similaires ou complètement différentes, numériques, analogiques, ou combinées. Le titre essaie de rappeler le film avec le même titre, parce que le réseau est à Montréal, et nous parlons français également.
  • « Electronics projects. » J'ai commencé cette liste de lecture en pensant surtout à encourager les débutants à réaliser des projets et à comprendre les bases de l'électronique. J'y présente de nombreux circuits logiques simples et des outils bon marché à construire, comme une sonde logique, des testeurs de leds, etc. Les outils bon marché sont toujours utiles aux débutants et dans tous les domaines. Je commande et j'analyse également des projets déjà publiés dans des magazines d'électronique. Regardez mes vidéos « TV-B-Gone », « Miniature Larson Scanner », « PC Keyboard Tester », « Beep Logic Tester », et les autres. Je présenterai inévitablement ici quelques circuits analogiques, ainsi que des descriptions de pièces électroniques, un peu comme dans les séries du magazine Elektor « Composants », « Questions & Réponses », « Elektor Labs », « Trucs et Astuces », et ainsi de suite.
 
Les premiers simulateurs d’automates.

ElektorQu'est-ce qui a déclenché au départ votre intérêt pour l'électronique ?

Christian Urbanescu Une grosse radio à tubes à vide, offerte par mes grands-parents. Un élément si étonnant de notre petite famille, car il parlait avec mille voix, il vibrait et chantait aussi, et le soir, il diffusait une lumière chaude et bien visible. Je l'ai regardé pendant des heures.
 

Avec mes yeux d'enfant de 7 ans, j'étais tellement fasciné par cet objet que ma mère était à bout, et essayait de me convaincre que ce n'était pas vraiment un être vivant. Venant de ma propre mère avec tant d'arguments, j'ai dû abandonner et admettre à contrecœur qu'il s'agissait peut-être effectivement d'une chose. Mais comme les choses peuvent finir par ne plus fonctionner, un jour j'ai commencé à penser autrement, et j'ai soudain décidé dans mon esprit qu'il fallait absolument que je le répare.

Je vous laisse deviner qu'il n'y avait pas vraiment de problème avec la grosse radio, elle faisait son travail à merveille. Mais cela devait être découvert bien plus tard,comme certains d'entre vous s'en doutent après les faits. Avec ma nouvelle obsession en tête, j'ai découvert que rien ne pouvait être accompli, à moins que je ne parvienne à retirer le panneau arrière en carton.

Ainsi, jour après jour, pendant les courts moments où ma mère était absente, j'ai commencé à desserrer les six vis une à une, jusqu'à ce que le couvercle tienne à peine en place. Je n'avais aucune idée de ce qu'était un tournevis, et les couverts ne se montraient pas très coopératifs non plus.

Enfin, le « jour J » est arrivé. Ma mère est sortie pendant plus de 15 minutes, me demandant de rester calme et silencieux. C'est évident. Sans perdre de temps, j'ai jeté le panneau mal aimé directement sur le sol. Les ondes de chaleur qui sortaient de l'énorme boîte m'accueillaient chaleureusement. Inutile de dire que j'ai affiché un grand sourire et que j'y suis allé, les mains en premier. C'est la dernière chose dont je me souvienne. Pour faire court, il a fallu environ deux semaines aux médecins de l'hôpital pour me remettre sur pied.

Et comme dans toute bonne histoire, il y a une fin. Dans sa sagesse bien connue, mon grand-père, réalisant que le pauvre enfant pourrait encore avoir d'autres rencontres avec le courant électrique au programme, m'a inscrit dans le plus grand club de radio de la ville. Ce fut le premier pas pour devenir, des années plus tard, un professionnel de la radio.

 
L'espace de travail de Christian Urbanescu.
Elektor Qu'est-ce qui a suscité votre intérêt pour un espace de travail ? Quels objectifs avez-vous poursuivis lors de l'aménagement de votre espace de travail ?

Christian Urbanescu Les étudiants qui suivent des programmes d'enseignement professionnel sont des adultes de tous âges. Le plus jeune d'entre eux avait 17 ans et le plus âgé 73 ans. Certes, à 73 ans, Gabriele ne cherchait pas de travail, mais il était simplement trop curieux, même après avoir pris sa retraite, et il a tout de même terminé le programme d'électromécanique comme un pro. Comme les cours sont organisés de manière pratique, on ne peut pas compter le nombre de projets et de questions qui s'y rapportent. J'ai donc dû reproduire ou améliorer certains de ces projets, la plupart du temps pendant les week-ends, car je n'avais pas d'autre temps disponible, et ensuite essayer d'imaginer les problèmes potentiels, les procédures de dépannage, la préparation des examens, etc.

Cependant, pour le grand laboratoire PLC, par exemple, je ne pouvais pas emprunter les énormes panneaux avec des moteurs triphasés et des entraînements à courant alternatif à la maison. J'ai donc utilisé mon espace de travail personnel pour concevoir mes propres simulateurs, en fonction de l'espace dont je disposais. Et vous savez quoi ? Les produits de ma conception équipent maintenant un laboratoire complet de faible puissance et plusieurs armoires. Ils sont actuellement utilisés par tous les élèves, ainsi que par les autres enseignants, et certains d'entre eux peuvent être vus dans la vidéo #3 sur ma chaîne ! Sans compter que, par rapport à des projets similaires que l'on peut trouver sur des sites spécialisés, le mien est beaucoup moins cher. C'était l'un des arguments pour convaincre n'importe qui de s'impliquer dans la construction d'une unité didactique. Car si en un an vous devenez tellement bon avec la programmation des automates, que vous pouvez vendre votre unité didactique, par exemple sur eBay, vous êtes en mesure alors de récupérer votre argent tout de suite !

 
Des simulateurs PLC haut de gamme prêts à l'emploi.
Elektor Quels sont les projets Elektor spécifiques qui vous ont le plus aidé dans votre enseignement ? Avez-vous des recommandations à faire aux étudiants ou aux débutants ?

Christian Urbanescu J'ai utilisé tellement d'articles et de schémas d'Elektor, comme d'autres sources au cours de ces 20 dernières années, que je n'ai jamais pensé à les répertorier, ni à les classer par ordre d'importance. Maintenant, en y réfléchissant, j'ai dressé une courte liste de ceux dont je me souvenais facilement et que je retrouvais parmi les articles publiés par Elektor :
 
  • Commutateur USB pour imprimantes : Je l'ai construit et je l'utilise depuis environ 15 ans. Il est décrit dans plusieurs de mes videos.
  • Recyclez votre alimentation ATX : C'est certainement le projet qui a eu le plus de succès. Je l'ai reproduit dans plus de 150 exemplaires. Les étudiants récupéraient ou achetaient une alimentation de PC d'occasion, puis nous fabriquions et fixions le projet dessus. De cette manière, toute personne souhaitant s'exercer un peu à l'électronique de faible puissance pouvait le faire. Nous avons même amélioré la conception originale pour compenser certains défauts.
  • Testeur de LED : Également présenté dans l'une de mes vidéos. C'était un projet phare sur mon cours d'introduction sur les leds.
  • Beep - une sonde logique/testeur sonore : Une autre vedette dans mes vidéos YouTube . Par l'intermédiaire de l'un de nos distributeurs, j'en ai commandé des dizaines à Elektor. Malheureusement, ce produit a été abandonné à un moment donné.
  • Le RLC-mètre : Le projet Elektor le plus précieux pour moi. Je l'ai utilisé comme démo de nombreuses fois.
  • Horloge de sable : Celui-ci, d'ailleurs, a été le plus difficile. J'ai encore quelques difficultés à l'utiliser.
  • Toupie électronique : C'est devenu une démo très accrocheuse pour le concept de point de valeur (POV) dans ma classe.
  • Télémètre USONAIR : Avec le projet suivant, cela a été très utile pour introduire un capteur ultrasonique standard comme le HC-SR04.
  • Mesure de niveau et de distance : Un excellent complément au projet précédent.
  • Aire de jeux AVR : C'est le support pour le livre « Mastering Microcontrollers helped by Arduino » .

Je ne peux pas être assez précis, mais pour arrondir les chiffres, je dirais que plus de 100 projets Elektor sont passés par mon établi. Si je devais recommander à un débutant en électronique par où commencer, je lui poserais d'abord la question suivante : « Êtes-vous un amateur ou avez-vous l'intention de devenir un professionnel dans ce domaine ? » .

Les projets Elektor.

La réponse est simple pour la deuxième option : inscrivez-vous dès que possible dans un programme structuré correspondant à vos souhaits, à un niveau professionnel ou universitaire. Pour les amateurs, en gardant à l'esprit que la plupart des objets qui nous entourent sont régis soit par des microcontrôleurs, soit par des microprocesseurs, je suggérerais de commencer par le plus facile à gérer, en termes de ressources et surtout de temps : les microcontrôleurs.

Il y a un livre qui est fortement recommandé dans la boutique ElektorCours pratique sur les microcontrôleurs pour les débutants Arduino (offre groupée). Vous obtenez à la fois un excellent petit appareil de formation, avec  Arduino Nano inclus, et un manuel pratique avec plus de 40 projets. C'est le meilleur investissement pour votre temps et votre argent, pas besoin d'acheter quoi que ce soit d'autre pour commencer.

Pour ce qui est de l'étape suivante, les microprocesseurs, nous pouvons parler du Raspberry Pi. J'insiste sur le fait que ce n'est pas la même chose qu'Arduino, car c'est un ordinateur monocarte complet (SBC).

Les simulateurs d’automate en cours de montage.

Elektor Parlez-nous de votre projet préféré dans le domaine de l'électronique. Qu'avez-vous construit et pourquoi ?

Christian Urbanescu : En 25 ans d'enseignement, mon point de vue sur la conception de projets a complètement changé. Pendant mes années à l'université, où j'ai souvent dû faire face aux difficultés mathématiques de base de la part de mes étudiants, et pendant la longue période que j'ai passée dans l'enseignement professionnel, les gens qui étaient censés avoir au moins une vague idée des lois d'Ohm ou de Kirchhoff n'en avaient en fait aucune. J'en suis venu à la conclusion que les choses les plus difficiles à saisir et à comprendre pour les débutants étaient les notions élémentaires d'électronique, c'est-à-dire les résistances, les condensateurs, les inductances, les semi-conducteurs et la manière dont ils sont connectés ensemble pour former un schéma. J'ai donc commencé à redéfinir mes projets pour simplifier les choses.

Ainsi, même si cela semble être une évidence et n'implique pas beaucoup de calculs, avec juste l'ampérage de base et la consommation d'énergie, je suis particulièrement fier des trois versions principales de mon simulateur d'automate (sortie numérique).

J'ai vu beaucoup de simulateurs, et la plupart d'entre eux étaient des assemblages rigides où l'automate et les sorties étaient logés dans la même boîte. Il était impossible d'utiliser les sorties avec un autre automate, à moins de tout démonter. D'autres unités didactiques étaient livrés avec une plaque d'essais, permettant aux utilisateurs de relier leurs propres sorties externes à l'automate. Cependant, dans notre centre de formation, nous disposions d'une grande variété d'automates programmables prêts à être programmés. Pour résoudre ce problème, j'ai trouvé une solution simple en séparant l'automate des sorties physiques externes.

L'unité didactique sert de simulateur pour des charges industrielles réelles, et j'ai donc décidé d'assembler une carte comportant des périphériques de sortie courants, tout en minimisant le bruit, comme les lumières, les moteurs et les ventilateurs. J'ai éliminé les buzzers d'alarme et les distributeurs/ vérins pneumatiques de la conception pour des raisons évidentes. En utilisant des lampes, des ventilateurs et des relais de qualité industrielle, nous avons pu nous rapprocher des objectifs de la formation.
 

L'élément clé de ma conception était un bornier spécifique, appelons-le interface, vers lequel convergent toutes les sorties. 

Sur toutes les cartes des automates, quelle que soit la marque, j'ai fixé un bornier similaire et j'y ai câblé toutes les sorties automate. En sertissant un câble plat fabriqué en interne - bingo ! Je pouvais alors connecter n'importe quel type d'automate à un simulateur de sortie standard, ce qui rendait les tâches de programmation beaucoup plus conviviales. Après plusieurs itérations, j'ai opté pour trois versions, avec une version d'entrée de gamme que j'encourage mes étudiants à construire eux-mêmes (détaillée sur ma chaîne), une version de milieu de gamme présentée dans la vidéo, et une version haut de gamme préparée pour 30 sorties numériques NPN/PNP, également pourvue d'entrées et de sorties analogiques de boucles de courant 4-20 mA.

Une version d'entrée de gamme que j'encourage mes étudiants à construire eux-mêmes.
Une version intermédiaire présentée sur YouTube.
Une version haut de gamme prête pour 30 sorties numériques NPN/PNP.
Elektor Quels sont les équipements et les outils dont vous disposez dans votre atelier ? Pouvez-vous nous dire comment et où vous rangez le matériel et les instruments ? Lequel est votre préféré ?

Christian Urbanescu Mon espace de travail est divisé en deux zones distinctes, qui n'interfèrent pas l'une avec l'autre. J'utilise deux bancs identiques, avec l'un d'eux réservé à la programmation, à la consultation de la documentation et à l'examen des schémas. Il est équipé d'un ordinateur et d'un Raspberry Pi. Grâce à un commutateur KVM, je peux utiliser mon équipement moniteur/clavier/trackball pour les environnements Windows et Linux. Si j'avais pu, je n'aurais utilisé que Linux. Malheureusement, la plupart des marques d'automates n'ont que des logiciels conçus pour Windows. Cela fait des années que j'essaie de les faire fonctionner sous Linux, avec des résultats très limités jusqu'à présent. Il existe quelques interfaces logicielles prometteuses, comme Waves, mais les ensembles logiciels complexes n'acceptent que Windows.
 

L'autre établi sert à bricoler des projets. Comme le disait Bob Pease : « Mon langage de programmation préféré est la soudure » . Par le passé, je remplissais mon sous-sol de toutes sortes d'instruments cassés que je pouvais récupérer auprès de divers fournisseurs d'équipement et réparer. À un moment donné, cependant, j'ai dû mettre de côté mon attachement émotionnel et j'ai décidé de ne garder sur l'établi que les appareils strictement nécessaires. La liste est assez courte, avec une alimentation triple, plus une vieille alimentation HP de collection que je ne pouvais pas jeter, un oscilloscope numérique bon marché, plus un oscilloscope analogique que je ne peux pas non plus abandonner parce qu'il a demandé trop d'efforts pour être réparé, un bon générateur de fonctions de table, un multimètre Fluke de table, et enfin une station de soudage, bien sûr. C'est tout.

 
Tout ce dont j'ai besoin pour le dépannage en déplacement, et le tout emballé dans une grande boîte pour une flexibilité totale !

Pour plus de flexibilité, je conserve dans une grande boîte plusieurs multimètres portables, des sondes logiques, des programmateurs PIC, des pinces de mesure, le LCR-mètre Elektor, une station de soudure de rechange, un oscilloscope portable sur tablette et un générateur de fonctions, afin de pouvoir dépanner lorsque je transporte mes démonstrations. Mais aucun de ces petits outils n'a plus de place permanente sur l'établi, et ils doivent tous tenir dans la grande boîte.

Les instruments auxquels je suis le plus attaché ? Mon multimètre de table Fluke. Lorsque j'ai cassé son fusible de 400 mA, j'ai eu un petit pincement ! Et ma sonde logique vieille de plus de 30 ans. Je n'ai pas encore trouvé mieux. Les étagères sur mon mur sont remplies de dossiers et de projets de démonstration que je peux utiliser pour mes présentations.

Elektor : Vous souvenez-vous de votre premier projet en électronique ? Pouvez-vous le décrire et préciser les technologies utilisées ?

Christian Urbanescu : Tout au long de ma carrière, j'ai porté avec moi une tonne de projets qui n'ont pas abouti. Le premier grand succès a été une radio à transistors super-hétérodyne, que j'ai assemblée alors que j'étais en huitième année. Cette radio est devenue une puissante source de motivation pour mes projets futurs, car j'en ai fait cadeau à mon grand-père. Je pouvais sentir à quel point il était fier, se retirant discrètement dans un coin reculé de son jardin pour capter ses stations préférées, comme « La Voix de l'Amérique » .

Environ 7 années se sont écoulées entre ma tentative enthousiaste de « réparation » de la grande radio familiale, et le moment où j'ai pu assembler une radio de poche entièrement fonctionnelle. Son petit haut-parleur et avec un son médiocre, provenant d'amplis à transistors au germanium, n'arrivait pas à la cheville de mon vieil ami à tubes à vide. Mais bon, elle était portable et ne nécessitait qu'un paquet de quatre piles. Le plus important, c'est que le « client » en était très satisfait !

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Elektor : Avez-vous des conseils, des astuces ou des encouragements à donner à d'autres ingénieurs ou makers qui souhaitent créer un espace de travail ?

Christian Urbanescu : Si je devais donner un conseil à quiconque, soit ingénieur, technicien ou simple amateur, en matière d'équipement et d'instruments, ce serait le suivant : s'il vous plaît, faites de votre mieux pour les réduire au minimum. Je sais qu'avec le temps, nous tombons tous dans l'attitude de l'écureuil, et que nous accumulons de plus en plus de choses. Mais le vieux dicton est toujours d'actualité : « Vous avez un équipement ou un instrument ? Si tu ne l'utilises pas pendant un an, débarrassez-vous en ». Au moins, j'ai trouvé un compromis, car tous les instruments que je n'utilise pas actuellement doivent tenir dans cette boîte. Il n'y a pas de place pour en rajouter plus.

J'aurais aimé partager un espace de travail commun avec d'autres amateurs, en dehors de la maison. C'est un souhait irréaliste, car la location d'un atelier coûte cher. En ce qui concerne les débutants, j'ai le même conseil que celui que j'ai donné à mes étudiants pendant des années, celui de ne pas investir votre argent dans des appareils coûteux, et cela pour deux raisons :

  • Premièrement, en tant que débutant, il ne faut pas avoir honte de faire des erreurs. Un autre dicton nous rappelle que notre compétence est proportionnelle à la quantité de matériel que nous avons cassé. Ainsi donc, si vous oubliez votre appareil de mesure sur la résistance et que vous mesurez accidentellement la tension du réseau, il s'éteindra instantanément. Mais si vous avez été malin et que vous avez acheté un appareil de mesure à 10 dollars, vous n'aurez à regretter que 10 dollars ! Soit dit en passant, si vous êtes vraiment déterminé à faire une mauvaise manipulation, il faut le même nombre de millisecondes pour casser un appareil de mesure bon marché ou un multimètre Fluke.
  • Deuxièmement, utilisez votre argent pour couvrir des besoins plus urgents. Un jour, vous obtiendrez le travail de vos rêves et vous pourrez alors acheter tous les appareils de mesure que vous souhaitez.
 

Elektor Vous travaillez actuellement sur un projet d'électronique ou de programmation ?

Christian Urbanescu J'essaie de mettre au point une sorte d'interface d'automate flexible qui peut être utilisée pour des cartes d'automates à 8 ou 16 sorties. Le projet comporte deux parties. La première est très simple, et elle permet à un automate à transistors NPN (16 sorties) de se connecter à des charges en courant alternatif. L'autre section est destinée aux automates à 8 transistors de sortie, qui peuvent se connecter aux deux types de charges, 24 V continu ou 120 V alternatif, que les transistors de sortie soient PNP ou NPN.
 
Interface d'automate flexible : Connecter des cartes automates NPN à 16 sorties à des charges en courant alternatif et des cartes automates à 8 sorties à des charges en courant continu et en courant alternatif.
ElektorY a-t-il des aspects qui ont particulièrement retenu votre attention et que vous aimeriez approfondir ?

Christian Urbanescu Pendant la pandémie, j'ai réutilisé une vieille idée pour en faire un dispositif de contrôle de l'occupation des toilettes pour mes élèves. Le dispositif utilisait deux capteurs sur le cadre de la porte, pour compter les personnes qui entraient et sortaient, avec un voyant rouge lorsque trois personnes étaient à l'intérieur et un voyant vert lorsqu'il y en avait moins. C'était un moyen simple et non intrusif de sensibiliser à la sécurité.
 

Pour aider mes étudiants dans leur recherche d'emploi, j'ai également créé profil LinkedIn  où ils peuvent me citer comme référence. De temps en temps, j'y publie de courts articles techniques, bien que les limitations de texte de LinkedIn peuvent s'avérer contraignantes.


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Traduction : Laurent RAUBER